Les équipes de l’IECD au Liban redoublent d’imagination pour assurer la continuité des formations
BEYROUTH – 21 février 2020 – Le premier cas de Coronavirus est déclaré à l’hôpital Rafic Hariri de Beyrouth. Dans ce même hôpital, 18 personnes suivent la formation IECD d’aide à la personne âgée et malade (FAPAM) et sont dans la troisième semaine d’un cursus qui s’étend sur 4 mois. Afin de préserver les élèves du danger, l’IECD cherche activement une alternative, qu’elle finit par trouver le 11 mars… premier jour de confinement annoncé par Premier ministre libanais Hassane Diab et qui mettra fin à la formation en présentiel. Malgré les difficultés, les équipes locales vont redoubler d’imagination pour permettre aux jeunes de poursuivre leur formation et le Covid-19 n’aura raison ni de la formation FAPAM, ni des autres.
Avec près de 700 personnes par an bénéficiaires des formations courtes, le Liban est avec la Syrie le pays d’intervention de l’IECD qui met en œuvre le plus grand nombre de formations en situation de crise. Déployées à grande échelle dans des secteurs à forte demande (électricité, maintenance de climatiseurs, plomberie, aide à la personne âgée et malade, restauration, etc.), elles ont pour vocation d’offrir les clés d’une insertion rapide dans le monde du travail et de dégager des revenus de subsistance.
Rana Jammal, chef de projet des formations courtes au Liban, nous raconte comment les équipes de l’IECD ont su adapter leurs activités pour faire face à la crise sanitaire et faire en sorte que les personnes bénéficiaires, déjà très affectées par la crise économique sévère, ne soient pas davantage pénalisées. Le confinement vient aggraver une situation déjà très critique et pour les plus précaires d’entre eux, les besoins de première nécessité ne sont parfois pas assouvis.
Quel a été l’impact du confinement sur les activités qui étaient en cours et quelles ont été vos premières mesures envers les personnes bénéficiaires ?
« Lorsque les mesures de confinement ont été mises en place, cinq formations étaient en cours, ce qui représente 80 élèves. Notre première action a été de maintenir un contact régulier par WhatsApp avec eux, afin de les aider à surmonter la crise et de concevoir un programme de formations à distance qui comprend : l’envoi de conseils de prévention au Covid-19, des conseils pratiques sur la vie quotidienne en confinement et des informations sur les actions d’ONG apportant une aide matérielle. Deux jours sont dédiés à la formation technique et une journée aux Life Skills avec des sessions animées en direct par les formateurs sur whatsapp.
Nous faisons en sorte que tout le monde puisse avoir accès à WhatsApp et reste connecté.
Un élève suit une formation dispensée à travers l’application Whatsapp
Comment se passent les cours en ligne ? Comment réussissez-vous à maintenir l’assiduité des personnes bénéficiaires ?
« Les contenus de formation sont réactualisés pour permettre aux élèves de poursuivre leur apprentissage et de ne pas être trop pénalisés par le confinement. Un travail collaboratif avec les formateurs et le responsable pédagogique de l’IECD a permis d’identifier les contenus qui pourraient être transmis en ligne. Concernant la formation d’Aide à la personne âgée et malade par exemple, les formateurs se filment en situation : les gestes et techniques qu’ils expliquent d’ordinaire en présentiel, sont montrés par l’intermédiaire de vidéos. Les élèves sont très admiratifs de leurs formateurs qui se confrontent au danger quotidiennement. Leur motivation est renforcée car ce métier prend tout son sens, et poursuivre la formation est pour eux une forme de soutien !
Avec WhatsApp, la communication est assez aisée et interactive : malgré les difficultés financières, économiques et psychologiques, les personnes bénéficiaires participent toujours aux sessions, en particulier aux sessions techniques. C’est aussi pour nous un moyen d’avoir un suivi et d’éventuellement rattraper les personnes que nous « perdons ». Actuellement, nous comptons 4 abandons seulement. En effet, certains élèves sont « absents » mais lors du suivi réalisé, ils assurent vouloir reprendre la formation en présentiel dès que possible et donnent des raisons d’absence liées à des obligations familiales, de travail ou d’un manque d’accès à un réseau Internet. Parmi les 80 élèves, une soixantaine participent activement aux sessions interactives organisées sur WhatsApp.
Comment envisagez-vous l’après-Corona et la reprise des activités ?
Notre première préoccupation est de ne pas faire perdre de temps à nos bénéficiaires qui se trouvent tous dans le besoin. Nous testons donc actuellement un système de validation des acquis théoriques, de façon à ne reprendre ensuite que la formation pratique.
Par ailleurs, les formations en ligne sont très demandées par nos partenaires qui nous sollicitent vivement sur ce sujet. Notamment le HCR, qui a en charge les populations réfugiées qui représentent un quart de la population libanaise. Nous souhaitons donc saisir l’occasion pour accélérer le développement de nos formations à distance. Nous envisageons d’adapter nos contenus pour une mise en ligne afin de simuler par exemple des opérations de maintenance en 3D. Ce travail sera réalisé par l’équipe qui travaille au sein de l’entreprise sociale créée par l’IECD en 2016.
Un élève suit un cours en ligne grâce à des vidéos transmises par les formateurs
En quelque sorte, la crise du Covid-19 vous permet de repenser vos contenus de formations et les moyens de les dispenser ?
C’est exactement cela. Cet investissement n’est pas perdu. Le Covid-19 nous permet de faire un bond en avant dans le développement des outils numériques. Sans tomber dans l’excès du « tout numérique », on peut imaginer un équilibre entre les formations à distance et en situation réelle. Cela peut répondre à des besoins précis pour les personnes qui ne peuvent pas sortir de chez elles, ou qui sont très éloignées des lieux de formations. Elles ne doivent pas être exclusives, car la pratique est essentielle d’une part et le numérique ne remplace pas le contact humain ni l’importance du suivi sur le terrain aux côtés des personnes.
Le développement des formations en ligne reste un atout important qui nous permettra d’atteindre davantage de personnes. Nous imaginons aujourd’hui un éventail de formations toujours plus pertinent, au service des plus vulnérables, qui pourrait s’étendre à tous les programmes et pays de l’IECD.
